lundi 4 novembre 2013

L'automne à Berlin - jour 3

Ça y est, fallait bien que ça arrive : il ne s'est rien passé aujourd'hui. Rien de rien. Je me suis couchée très tard, pas parce que je suis allée danser dans une cave, ni parce que j'ai assisté à un vernissage, je ne suis même pas allée au Lichtblick, la petite salle art et essai près de chez moi, alors que ça fait une semaine que je veux aller voir Am Ende der Milchstraße. Non, même pas une petite bière avec quelqu'un, n'importe qui. Je suis restée chez moi. J'aurais pu faire la vaisselle, dégager de la place sur mon plan de travail et me cuisiner un repas décent. Ça non plus, je ne l'ai pas fait. Au lieu de tout ça, j'ai mangé des tartines de mauvais pain blanc avec un reste de fromage frais aux herbes de la marque premier prix du Kaiser's, A&P (diminutif de Attraktiv und Preiswert, Attirant et Bon Marché. Après trois ans de vie en Allemagne, ce nom de marque me fait toujours autant rire. Dois-je en déduire que je n'évolue pas ? Je réfléchirai à ça un autre jour si tu veux bien, il est temps de mettre un terme à cette parenthèse) en m'enfilant tous les épisodes de Talk 2000 que je trouvais sur Youtube. Talk 2000, c'était un talkshow animé par Christoph Schlingensief il y a une quinzaine d'années. Chaque émission avait une thématique (Le culte du corps, La morale en Allemagne, Les animaux sont-ils les meilleurs humains ? etc), deux invités, vaguement en lien avec celle-ci, qui étaient installés avec le modérateur sur une plateforme rotative au milieu du café de la Volksbühne, et le tout partait savamment en couille pendant une demi-heure. Il accueillait ses invités en sautant et en scandant leur nom comme un supporter de foot, et pendant le générique de fin, chacun devait donner un message d'espoir à tous les chômeurs du pays sur une musique assourdissante. Entre ces deux extrémités, Schlingensief renversait parfois des objets, jouait au con puis ouvrait son cœur, se levait en sursaut pour aller chercher le concierge du bâtiment voisin, répondait au téléphone, faisait apporter un homard sur le plateau et en jetait des morceaux dans le public, enlevait son pantalon ou allait demander à une vieille dame du public quand elle avait pleuré pour la dernière fois. Ce sentiment d'imprévisibilité et de ne jamais savoir si c'est du lard ou du cochon déstabilise tout le monde, les invités comme le spectateur, et c'est précisément là que naissent les interactions les plus sincères et que se dévoile la nature des gens. Et surtout, surtout, qu'est-ce qu'on se marre.
Voilà, j'ai regardé ça tout une partie de la nuit, je me suis levée tard, il a fait gris, je suis allée au lavomatique dans l'espoir qu'il m'y arrive quelque chose, mais rien, sinon que la centrale de paiement m'a craché de la lessive en poudre sur les chaussures. Et ce soir, au café où je travaille, alors que cet endroit est une source intarissable d'anecdotes incongrues, rien, rien, trois fois rien. Pas un client désagréable, pas une flaque de vomi à éponger, pas une dispute de couple. Alors si tu permets, je vais aller me coucher.

4 commentaires:

  1. rien non plus ici, pas l'ombre d'un commentaire ?
    tes lecteurs n'arrivent plus à suivre ton rythme intrépide on dirait...

    sinon, cette émission a l'air intéressante, ça change des désormais incontournables "clash" pour tenter de faire le buzz et la promo.

    MMmmmm Morille... quand et pourquoi as-tu pleuré pour la dernière fois...?
    en voilà une question intéressante !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je pense que mon lectorat est dépassé par la situation. Je vais boucler cette expérience jeudi et revenir à mon ancien rythme où je postais des bêtises une fois par semaine.
      La dernière fois que j'ai pleuré, c'était en août, sur une route de campagne dans la région de Montluçon.

      Supprimer
  2. c´est quoi ce complot pour arrêter la quotidienne !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. hey, on s'était mis d'accord que la quotidienne durerait 7 jours, pas un de plus. même en n'y passant qu'une petite demi-heure, ça prend quand même beaucoup d'énergie ces bêtises !

      Supprimer